Lettre ouverte publiée dans La Presse, le 21 mai 2025.
Pour certains milieux de travail, chaque jour de grève, ce sont des milliers de rendez-vous manqués, des contrats repoussés et des projets suspendus. L’économie du Québec ralentit, et avec elle, c’est toute la société qui encaisse le choc.
Pour nos entreprises et la population, ces interruptions de service ne sont pas sans conséquence : elles se traduisent par des pertes de revenus, une érosion de la compétitivité, des coupes de postes, des pertes d’accès à des services publics et un climat d’incertitude grandissant. Pour protéger l’équilibre de notre économie, une mise à jour s’impose.
Face à cette réalité, le gouvernement du Québec a présenté le projet de loi 89, visant à considérer davantage les besoins de la population en cas de grève ou de lock-out.
Ce projet de loi propose notamment le maintien de services assurant le bien-être de la population et confère au gouvernement le pouvoir d’intervenir lorsque des conflits de travail causent un préjudice grave ou irréparable, un concept reconnu par le Comité de la liberté syndicale de l’Organisation internationale du travail.
L’appui populaire est clair : selon un sondage Léger réalisé en mars 2025, 74 % des Québécois estiment que les conflits de travail trop fréquents nuisent à notre économie, et 72 % souhaitent que le gouvernement ait les leviers pour y mettre un terme lorsque la situation le commande.
Dans un contexte où la rareté de main-d’œuvre persiste et où les entreprises peinent déjà à recruter et à maintenir leur capacité opérationnelle, le Québec ne peut plus se permettre de subir les contrecoups d’un cadre législatif dépassé en matière de relations de travail. Nous avons besoin d’un environnement stable, prévisible et résilient.
L’Institut économique de Montréal révélait récemment qu’en 2023, le Québec a enregistré un nombre record de 691 grèves, dépassant largement le précédent sommet de 384 établis en 1974. Cette escalade s’est poursuivie en 2024 avec 759 grèves, dont 87 % dans les secteurs publics tels que l’éducation, la santé et les services sociaux. L’année 2025 ne s’annonce guère meilleure : plusieurs conflits importants sont déjà en cours, dont celui qui oppose les ingénieurs de l’État au gouvernement. D’autres secteurs stratégiques laissent présager une mobilisation accrue, ce qui alimente un climat d’instabilité économique et sociale.
Nous croyons que le projet de loi 89 constitue une réponse pragmatique et mesurée à une réalité qui ne peut plus être ignorée.
Il s’agit d’un outil moderne pour assurer un climat social propice à la croissance, tout en respectant les fondements du dialogue social.
Il permettra d’éviter que l’intérêt général soit pris en otage au nom d’intérêts sectoriels, et contribuera à préserver la réputation du Québec comme lieu d’investissement et d’innovation.
Nous en appelons donc à tous les parlementaires pour qu’ils adoptent rapidement ce projet de loi. Il en va de la vitalité de nos entreprises, de la confiance des investisseurs, mais surtout, de la qualité de vie de l’ensemble des Québécois.
Marie-Claude Perreault, présidente et cheffe de la direction, par intérim, Conseil du patronat du Québec;
Véronique Proulx, présidente-directrice générale, Fédération des chambres de commerce du Québec ;
François Vincent, vice-président, Québec, Fédération canadienne des entreprises indépendantes ;
Julie White, présidente-directrice générale, Manufacturiers et Exportateurs du Québec