Où est passé l’engouement pour l’achat local?

Lettre ouverte publiée dans le Devoir, le 25 novembre 2023.

 

Le sentez-vous dans l’air? Ce parfum réconfortant, excitant et nostalgique de fin d’année, la première neige qui arrive, les décorations de Noël envahissant les vitrines… Le temps des fêtes s’en vient, et il est l’heure de se lancer dans la quête des présents que l’on déposera au pied de nos sapins. 


Vers qui nous tournerons-nous alors? Vers nos petits commerces locaux, ou bien vers les géants du net ou les multinationales?
Récemment, j’ai écouté le film Vous avez un message, avec Tom Hanks et Meg Ryan. Il raconte l’histoire d’une propriétaire de librairie indépendante et familiale, implantée depuis 40 ans à la même adresse, qui se retrouve soudainement en compétition avec une nouvelle boutique d’un mastodonte du livre. Comment peut-elle compétitionner face à un géant proposant une grande diversité de livres à des prix plus bas? Le calcul est rapide. Mais, cette femme se bat au nom de ce qu’elle estime être l’essence du petit commerce : le service, la connaissance du produit, l’atmosphère chaleureuse et la communauté. 


Parce que le commerce local est engagé dans sa communauté. D’ailleurs, saviez-vous que chaque dollar dépensé dans une PME permet de garder 0,66 $ dans l’économie locale, comparativement à 0,11 $ lorsque l’argent se retrouve entre les mains d’une multinationale? C’est ce que démontre une récente étude de la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante (FCEI). La grande majorité des petits détaillants contribuent à leur collectivité ou à leur province d’au moins une façon et sont la force motrice de nos collectivités. Ils embauchent et forment la prochaine génération, offrent des produits uniques et des services personnalisés, tout en renforçant le sentiment d’appartenance communautaire. 


Ce n’est pas pour rien que plus de 9 Canadiens sur 10 aiment leurs petits commerces locaux! Malheureusement, seulement 13 % y font la plupart de leurs achats, selon un sondage commandé par la FCEI. De ce fait, 78 % des petits détaillants disent perdre des clients et des revenus aux mains des grandes entreprises. 

En effet, la plupart des Canadiens (87 %) indiquent faire leurs achats en majeure partie chez les grands détaillants, en magasin ou en ligne.

La fin du film de Meg Ryan et Tom Hanks illustre cette tendance : la petite librairie historique ferme, et la multinationale gagne. Morale : les rues des villes s’uniformisent et il faut se déplacer davantage pour trouver nos produits ou bien se tourner vers le Web. Veut-on voir transformer nos quartiers et nos cœurs de villages pour enlever la diversité et l’apport si important de nos commerces indépendants? 

Il y a quelque chose de séduisant et de familier dans le fait d’acheter des produits d’ici, à des gens d’ici. Non seulement nous injectons de l’argent dans l’économie locale, mais nous faisons un geste écologique en réduisant la pollution liée au transport et à la livraison des marchandises, en plus d’encourager des emplois proches de chez soi.


L’essoufflement de l’achat local se lit sur de nombreuses lèvres et dans de nombreux sondages ces derniers mois. En effet, les prévisions pour cette fin d’année ne sont pas réjouissantes pour nos PME : 40 % des Canadiens s'attendent à dépenser moins pendant les fêtes par rapport à l'année dernière. De plus, 34 % d’entre eux effectueront une plus grande partie de leurs achats chez les grands détaillants et les géants de la vente en ligne. 


Mais, rappelez-vous ceci : les grandes entreprises ne remarqueront pas votre achat. Le propriétaire d'une petite entreprise, lui, le remarquera. En fait, il en sera ravi. Il pourrait même changer sa vie.


Comme tout bon film Hollywoodien, Meg Ryan trouve l’amour dans son malheur. Mais la fiction n’est pas la réalité. Dans la vraie vie, les personnes à la tête d’un commerce de proximité ne trouvent pas l’âme sœur en fermant boutique. Nos entrepreneurs vivent une toute autre réalité, bien plus impactante.


Nous avons l’occasion de soutenir les propriétaires de petites entreprises avec le Samedi PME pour faire contre-poids au Vendredi fou. Alors, le 25 novembre, pensons à nos petits commerces locaux qui continuent à promouvoir l’originalité et la différence lorsque nous préparerons les fêtes de fin d’année. Pensons à notre communauté et soutenons nos entrepreneurs d’ici. Célébrons notre singularité et notre savoir-faire! 


Maud Larivière, attachée de presse