InsightBiz-Blog-French

Entre stabilité et croissance : Les attentes des petites entreprises en matière d’allégements fiscaux

11 août 2025

Dans le climat économique incertain qui prévaut aujourd’hui, les propriétaires de petites entreprises au Canada subissent des pressions grandissantes qui font de l’allégement fiscal non pas un levier d’expansion, mais un moyen essentiel de rester à flot. L’incertitude économique et politique, l’instabilité des échanges commerciaux, la hausse des coûts d’exploitation et le poids croissant de la fiscalité compliquent la planification, freinent l’investissement et menacent même la pérennité des opérations quotidiennes. Disposant de très peu de marge de manœuvre financière, bon nombre d’entreprises reportent leurs projets d’investissement et concentrent tous leurs efforts sur la maîtrise des coûts et la préservation de leur stabilité.

En tant que pilier de l’économie nationale, la capacité des petites entreprises à survivre et à croître est essentielle à la prospérité à long terme. Lorsqu’ils sont bien conçus, les allégements fiscaux peuvent contribuer à stabiliser les entreprises dès aujourd’hui tout en préparant le terrain pour de futurs investissements. Ce billet de blog s’appuie sur les données du plus récent sondage omnibus Votre Voix de la FCEI, mené en juillet 2025, pour examiner comment les petites entreprises utiliseraient un allégement fiscal et ce que cela révèle de leurs besoins et priorités les plus urgents.

La croissance est conditionnelle, la stabilité avant tout

Lorsqu’on leur a demandé comment un allégement fiscal significatif influerait sur leurs activités, les propriétaires de petites entreprises ont été invité à faire un choix : utiliser cet allégement pour stabiliser leur entreprise ou pour la faire croître. Plus de la moitié (55 %) ont choisi la stabilité — utilisant les économies réalisées pour mieux gérer la hausse des coûts ou l’instabilité économique (figure 1). Par ailleurs, un peu plus du tiers (35 %) ont indiqué qu’elles investiraient dans la croissance, par exemple en augmentant leur capacité ou en pénétrant de nouveaux marchés.

Figure 1: Utilisation la plus probable d’un allégement fiscal par les petites entreprises

L'allégement fiscal est plus susceptible de servir à gérer les coûts qu'à favoriser l'expansion

tax-relief-f- (1)

Source: FCEI, Sondage Votre Voix, Juillet 2025, n = 2 088.
Question: Si le gouvernement prenait des mesures concrètes pour alléger le fardeau fiscal de votre entreprise, quel serait l’impact sur vos activités? (Sélectionner une seule réponse) 

 

Ce compromis met en lumière les décisions difficiles que doivent prendre les petites entreprises dans un contexte de ressources limitées. Pour bon nombre de petites entreprises, la croissance n’est pas envisageable tant qu’elles n’ont pas retrouvé une assise stable. C’est pourquoi la valeur d’un allégement fiscal ciblé ne réside pas uniquement dans la stimulation de l’investissement, mais aussi dans la capacité à aider les entreprises à reprendre le contrôle de leur situation financière. Une stratégie fiscale responsable doit refléter cette nuance : offrir des réductions de coûts immédiates qui soutiennent à la fois la résilience à court terme et la compétitivité à long terme.

Retombées sectorielles de l'allégement fiscal 

Dans presque tous les secteurs, la priorité dominante en matière d’allégement fiscal demeure la stabilité (figure 2). Les secteurs comme la construction (61 %), l’hébergement et la restauration (61 %), le commerce de détail (60 %) et les services sociaux (57 %) — qui font souvent face à des marges serrées, à des coûts fixes et à des difficultés de recrutement — sont particulièrement susceptibles d’utiliser l’allégement pour gérer leurs coûts plutôt que pour se développer. Pour ces entreprises, l’allégement fiscal vise plus à assurer la viabilité dans un environnement à coûts élevés qu’à se développer.

À l’inverse, seuls les secteurs des finances (57 %) et de la gestion et l’administration d’entreprises (57 %) se démarquent en tant qu’exceptions, la majorité des entreprises y utilisant l’allégement fiscal pour investir, croître ou se développer. Ces secteurs axés sur la croissance reflètent des réalités opérationnelles différentes, notamment des modèles d’affaires plus flexibles et une pression immédiate sur les coûts moins élevée malgré le climat économique incertain, mais ils demeurent minoritaires.

Figure 2: Utilisation prévue de l'allégement fiscal, par secteur

L'allégement fiscal soutient la stabilité dans la plupart des secteurs — la croissance est concentrée dans les secteurs de la finance et l'administration

Figure2_French

Source: FCEI, Sondage Votre Voix, Juillet 2025, n = 2 088.
Question: Si le gouvernement prenait des mesures concrètes pour alléger le fardeau fiscal de votre entreprise, quel serait l’impact sur vos activités? (Sélectionner une seule réponse) 
Remarque: *Taille d'échantillon < 40.

 

Comment les entreprises axées sur la stabilité et celles axées sur la croissance utilisent l'allegement fiscal 

Pour mieux comprendre comment l’allégement fiscal pourrait être utilisé, les réponses ont été segmentées selon que les entreprises privilégient la croissance ou la stabilisation. Comme l’illustre la figure 3, deux visions stratégiques distinctes émergent.

Les entreprises priorisant la stabilité sont les plus susceptibles d’affecter les économies réalisées au remboursement de dettes (61 %), à l’augmentation de la rémunération des employés (54 %), au maintien ou à la réduction des prix (40 %) ou à la constitution de réserves d’urgence (29 %). Leur approche vise moins l’expansion que la création d’un coussin financier pour traverser les périodes d’incertitude.

Les entreprises axées sur la croissance concentrent quant à elles leurs économies fiscales sur l’expansion des activités, que ce soit en augmentant la capacité ou en lançant de nouveaux produits (79 %), suivies par l’augmentation de la rémunération des employés (60 %) et l’embauche de nouveau personnel (49 %). Elles manifestent également un vif intérêt pour l’investissement dans l’automatisation, la formation et les outils numériques, ce qui témoigne d’une approche tournée vers l’avenir visant à stimuler les investissements et la productivité. Dotées de la flexibilité financière nécessaire, ces entreprises sont bien placées pour transformer ces investissements en véritables gains.

L’augmentation de la rémunération des employés figure parmi les priorités des deux groupes, reflétant la pression persistante pour attirer et retenir le personnel — même dans des conditions d’affaires très différentes. Avec la flexibilité financière adéquate, les deux types d’entreprises sont mieux placées pour investir dans leur main-d’œuvre, ce qui soutient à la fois la résilience et la croissance à long terme.

Figure 3: Affectation prévue des économies fiscales

Les entreprises axées sur la croissance réinvestissent, tandis que celles axées sur la stabilité misent sur le remboursement de dettes et la maîtrise des coûts. 

Figure3_French

Source: FCEI, Sondage Votre Voix, Juillet 2025, n = 2 032.
Question: Si les gouvernements réduisaient le fardeau global des taxes/impôts et des frais, comment votre entreprise utiliserait-elle l'argent ainsi économisé? (Sélectionner toutes les réponses pertinentes) 

 

 

Où cibler les réductions d'impôt? 

Les petites entreprises sont claires sur les domaines où l’allégement fiscal aurait le plus d’impact : elles souhaitent un soutien qui réduise les coûts directs liés à l’exploitation, en particulier ceux associés à la masse salariale, à la trésorerie et aux coûts opérationnels. Leur priorité numéro un est l’impôt des petites entreprises, choisi par 68 % des répondants, ce qui illustre à quel point elles accordent de la valeur à un allégement adapté à leur taille et à leur capacité financière (figure 4). 

Viennent ensuite l’impôt sur le revenu des particuliers (55 %), les taxes de vente (51 %), l’impôt foncier pour les entreprises (50 %), les taxes sur le carburant (49 %), les cotisations d’assurance-emploi (47 %) et l’impôt sur les gains en capital (43 %)

 

Ces préférences reflètent à la fois les pressions sur les coûts et les réalités stratégiques propres aux différents types d’entreprises. Le fait que presque tous les types d’impôts reçoivent un soutien important révèle un enjeu plus profond : les petites entreprises subissent le fardeau cumulatif du système fiscal, et pas seulement dans un domaine, ce qui souligne la nécessité de réévaluer la manière dont celui-ci soutient l’entrepreneuriat.

 

Pour beaucoup, l’allégement fiscal peut immédiatement atténuer les pressions sur les coûts et créer une marge pour réinvestir. Et si ces réductions sont souvent présentées comme des outils d’investissement ou de croissance, pour les petites entreprises, leur valeur réside tout autant dans l’amélioration de la liquidité et la compensation des coûts cachés liés à la conformité fiscale, aux difficultés de financement et à l’augmentation des dépenses d’exploitation. Dans ce contexte, l’allégement fiscal n’est pas un gain exceptionnel — c’est une marge de sécurité.

 

Figure 4: Principaux domaines fiscaux où les petites entreprises souhaitent des réductions

Le soutien devrait cibler les impôts liés au revenu, aux ventes et à la masse salariale.

tax-cuts-f- (1)

Source: FCEI, Sondage Votre Voix, Juillet 2025, n = 2 044.
Question:  Si les gouvernements (fédéral, provinciaux/territoriaux et municipaux) réduisaient les taxes et impôts, que devraient-ils cibler en priorité? (Sélectionner toutes les réponses pertinentes)
Remarque:  La taxe sur la santé et l'éducation des employeurs n'a été demandée que dans les provinces qui la perçoivent (NL, QC, ON, MB, BC).

 

Conclusion et recommandations

Si l’objectif est de bâtir une économie canadienne plus forte, l’autonomisation des petites entreprises par l’allégement fiscal est une première étape essentielle. Les petites entreprises qui parviennent à se stabiliser sont plus susceptibles de planifier, d’embaucher de nouveaux travailleurs et d’investir dans la technologie et la formation. Ce sont les fondations d’une économie plus productive et innovante.

Pour libérer ce potentiel, la politique fiscale doit refléter les pressions réelles auxquelles les entreprises sont confrontées : hausse des coûts des intrants, défis liés au personnel et marges bénéficiaires serrées. Cela signifie offrir un allégement fiscal ciblé qui aide les entreprises à se stabiliser lorsque nécessaire et à croître lorsqu’elles sont prêtes. Avec les bons outils, les petites entreprises pourront contribuer de manière significative à une économie plus dynamique et compétitive.

Sur la base de cette recherche, la FCEI recommande les actions suivantes afin de fournir un allégement fiscal ciblé et significatif aux petites entreprises :

  • Réduire l’impôt sur les entreprises : abaisser le taux fédéral d’impôt des petites entreprises de 9 % à 0 % pour l’avenir prévisible.
  • Alléger les charges sociales des employeurs : instaurer un taux de cotisation d’assurance-emploi plus bas pour les petits employeurs ou passer du partage actuel de 60/40 entre employeur et employé à un partage 50/50.
  • Exonération cumulative des gains en capital (ECGC): inscrire dans la loi l’augmentation prévue de l’ECGC à 1,25 million $.
  • Élargir l’accès aux crédits d’impôt à l’investissement et au soutien à la formation, particulièrement pour les entreprises qui réinvestissent dans la technologie, l’automatisation ou les outils numériques.

 

2022-09-21_AG_5966_Marvin_Cruz (1)
Marvin Cruz
est directeur de la recherche à la FCEI
Comment citer ce billet de blogue

Marvin Cruz , « Entre stabilité et croissance : Les attentes des petites entreprises en matière d’allégements fiscaux », FCEI, Blogue Perspective PME, 11 août 2025, https://www.cfib-fcei.ca/fr/rapports-de-recherche/entre-stabilite-et-croissance.

Disclaimer

The views expressed in this post are those of the author(s) and do not necessarily reflect the position of the Canadian Federation of Independent Business. Any errors or omissions are the responsibility of the author(s).