Le commerce des PME entre le Québec et l’Ontario : une route à élargir pour la croissance économique

Lettre ouverte parue dans La Presse, le 14 août 2023.

 

Les provinces de l’Ontario et du Québec sont des locomotives pour le Canada. Leurs économies combinées représentent la 4e zone économique la plus importante en Amérique du Nord, après la Californie, le Texas et l’État de New York.


Quand on décortique ces deux économies, on remarque rapidement la présence fondamentale des petites entreprises. En Ontario, 87 % des entreprises ont moins 20 employés, alors qu’au Québec la proportion est de 85 %. Pour les deux provinces, plus des deux tiers de tous les emplois se trouvent dans les PME. Ainsi, en favorisant la croissance des petites et moyennes entreprises, les gouvernements provinciaux assurent un avenir positif à leur économie et leurs citoyens.


Sachant toute l’importance des PME pour les économies provinciales, qu’en est-il de l’état des échanges 
commerciaux entre elles?


La Fédération canadienne de l’entreprise indépendante (FCEI) s’est penchée sur le sujet et dévoile les résultats dans une nouvelle étude.1 Celle-ci révèle que 215 000 PME commercent dans l’une et l’autre province, soit 107 000 PME québécoises et 108 000 PME ontariennes. Cela représente 39 % des PME au Québec et 22 % en Ontario. Les principaux secteurs sont les mêmes pour les deux provinces : le commerce de gros et de détail et la fabrication.
Afin d’élargir ce corridor économique, il serait stratégique de réduire les barrières déterminées par les 
PME. 


Pour les PME ontariennes, les principaux freins aux activités commerciales au Québec sont la barrière linguistique (47 %), les frais d’expédition élevés (24 %) et la complexité des règlements provinciaux (19 %). Au Québec, la première réponse des propriétaires de PME est qu’ils n’ont aucun frein (29 %) à leurs activités commerciales. Ils notent ensuite les frais d’expédition (27 %), la complexité des règlements provinciaux (19 %) et la barrière linguistique (17 %).


Touchons d’abord la question de la langue. Premier constat : connaître plusieurs langues ouvre autant de portes commerciales, comme le montrent l’importante proportion des PME québécoises qui sont investies dans le marché ontarien. Avec les services d’accompagnement offerts par les gouvernements, nous avons devant nous de véritables occasions économiques à portée de main ! De plus, le milieu d’affaires francophone de l’Ontario pourrait jouer un rôle clé.


Ensuite, il est possible d’améliorer la mobilité de la main-d’œuvre et le commerce intérieur en réduisant le fardeau administratif des PME, par exemple en ayant plus de mesures de reconnaissance mutuelle des accréditations professionnelles. Cela répondrait aux besoins de nombreuses PME à la recherche d’employés qualifiés.


Selon la FCEI, il est capital de porter une attention particulière à la fiscalité des petites entreprises. En effet, 9 PME sur 10 au Québec et en Ontario souhaitent que les gouvernements réduisent le fardeau fiscal global, à juste titre, puisque les deux trônent au sommet du palmarès des provinces où l’impôt sur le revenu des petites entreprises est le plus élevé.


C’est encore pire au Québec où les plus petites entreprises des secteurs de la construction et des services sont nettement plus désavantagées sur le plan fiscal. Celles des secteurs des services et de la construction qui ont une masse salariale annuelle de 5 500 heures ou moins doivent payer le taux d’imposition des multinationales. Cet écart impose un fardeau inéquitable à ces entreprises et nuit à leur croissance et à leur compétitivité. Il faut de toute urgence s’attaquer à ce problème et mettre en place un régime fiscal juste et équitable pour toutes les PME du Québec, similaire à ce que fait l’Ontario. Dans une économie où les petites entreprises jouent un rôle prépondérant, les taxer davantage n’est 
pas synonyme de croissance économique.


Les deux économies ont beaucoup à gagner de faciliter un meilleur accès au marché entre les deux provinces. D’ailleurs, ce sont des orientations qui sont plébiscitées par une forte majorité de propriétaires de PME des deux provinces, car ces derniers croient qu’une collaboration plus étroite entre le Québec et l’Ontario profitera à l’économie du Canada, à leur secteur d’activité et à leur entreprise. Voici donc un chantier à prioriser par les gouvernements Legault et Ford ! Encourager et augmenter le maillage entre les PME québécoises et ontariennes stimulera l’économie des deux provinces, tout autant que celle du reste du pays. 


François Vincent, vice-président pour le Québec
Benjamin Rousse, Analyste des politiques