Il y a tout juste un an, l’exemption de taxe de vente pour la période des fêtes 2024 promettait des économies à la caisse pour les consommateurs et un coup de pouce aux ventes des petites entreprises. En réalité, elle a apporté confusion, coûts supplémentaires et casse-tête derrière le comptoir.
Le dépôt de dernière minute du projet de loi C-78, à la fin novembre 2024, a permis au gouvernement fédéral de supprimer temporairement la taxe sur les produits et services (TPS) et la taxe de vente harmonisée (TVH) sur certains articles, notamment les aliments préparés, les boissons, les vêtements pour enfants et les livres.i Cette mesure visait à offrir aux Canadiens un allègement fiscal pendant la période des fêtes, du 14 décembre 2024 au 15 février 2025. Toutefois, cela a laissé aux petites entreprises à peine trois semaines pour décoder les nouvelles règles tout en se préparant à la ruée des fêtes. De nombreux propriétaires ont abordé cette période d’exemption fiscale inédite avec confusion, anxiété et incertitude quant à la manière de l’appliquer correctement.
Bien que le gouvernement fédéral ait eu de bonnes intentions en voulant « mettre plus d’argent dans vos poches » en période d’incertitude économique, ce qui semblait prometteur sur papier s’est révélé beaucoup plus complexe en réalité et a fini par n’apporter que des retombées économiques minimes, voire inexistantes, pour la majorité des petites entreprises.
Avant le congé de taxe
Les petites entreprises redoutaient déjà les défis à venir à l’approche du congé de TPS/TVH. Selon les données de la FCEI, 63 % estimaient ne pas disposer de suffisamment de temps pour appliquer correctement l’exemption, et près des trois quarts (74 %) s’attendaient à ce que sa mise en œuvre soit complexe et coûteuse (figure 1).
Figure 1 : Préoccupations des propriétaires d'entreprises à l'approche du congé de TPS/TVH
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Question : Êtes-vous d’accord ou pas d’accord avec les énoncés suivants concernant le congé temporaire de TPS/TVH? (Sélectionner une réponse par ligne)
Source : FCEI, Sondage : Impacts de la grève à Postes Canada et du congé de TPS/TVH, Du 26 Novembre 2024 au 8 Janvier 2025, résultats finaux, n= 5 469 à n= 5 482.
Pour certaines entreprises, le congé de TPS/TVH signifiait passer en revue l’ensemble de leur inventaire — article par article — pour déterminer quels produits étaient exemptés, mettre à jour leur système de point de vente en conséquence ou embaucher quelqu’un pour le faire juste avant le 14 décembre, puis à nouveau lorsque le congé prendrait fin.
Les entreprises étaient inquiètes. Elles devaient gérer la mise en œuvre du congé de TPS/TVH tout en répondant aux attentes des clients. Environ 42 % des petites entreprises craignaient la réaction des clients face à la portée du congé, notamment en ce qui concerne la clarté des articles exemptés par rapport à ceux qui ne l’étaient pas (figure 1). De plus, comme le montre la figure 1, près de la moitié des PME (48 %) redoutaient que l’Agence du revenu du Canada les poursuive pour des erreurs de TPS/TVH commises de bonne foi pendant le congé.
Une mise en oeuvre coûteuse et complexe, et des comportements de consommation pertubés
De nombreuses petites entreprises ont souligné que le congé de TPS/TVH ajoutait non seulement de la complexité à leurs opérations quotidiennes, mais aussi des coûts. Selon les données de la FCEI, 74 % des PME ont déclaré avoir engagé des dépenses supplémentaires, comme la reprogrammation de leurs systèmes de point de vente pour se conformer aux nouvelles exigences (figure 2). Cela a également eu un impact sur la trésorerie. Comme l’a noté une petite entreprise, elle avait déjà payé la TVH sur l’inventaire actuel qu’elle ne pouvait pas récupérer, ce qui a aggravé le fardeau financier lié à cette mesure temporaire.
Figure 2 : Les principaux défis anticipés par les PME dans la mise en œuvre du congé de TPS/TVH
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Question : Pensez-vous faire face à un ou plusieurs des défis ou changements suivants dans la mise en œuvre du congé temporaire de TPS/TVH? (Sélectionner toutes les réponses pertinentes)
Source : FCEI, Sondage spécial : Impacts de la grève à Postes Canada et du congé de TPS/TVH, Du 26 Novembre 2024 au 8 Janvier 2025, résultats finaux, n= 1 141.
Au-delà de la pression financière, de nombreuses petites entreprises ont également rencontré des problèmes liés à la mécanique de mise en œuvre de l’exemption et au manque de directives claires. Comme le montre la figure 2, 66 % des petites entreprises ont eu du mal à comprendre quels produits étaient exemptés, tandis que 70 % ont éprouvé des difficultés à planifier le traitement de l’exemption au point de vente. Plusieurs propriétaires ont exprimé leur frustration, qualifiant le déploiement de « mal chronométré, mal communiqué et sans préparation suffisante pour les entreprises ».
Le congé de TPS/TVH a également perturbé le comportement des consommateurs, créant des pressions inattendues sur les petits détaillants. Environ 41 % des PME ont signalé que des clients retournaient des articles pour les racheter une fois l’exemption appliquée (figure 2), tandis que d’autres ont constaté des achats retardés avant la date d’entrée en vigueur. Comme l’a partagé un propriétaire de magasin de jouets pour enfants :
« J’ai déjà constaté une baisse immédiate des ventes… beaucoup de gens attendent le 14 décembre pour faire leurs achats. Cela a un impact très négatif sur mon entreprise. »
Un maigre retour sur le temps et les efforts investis
À la fin du congé de TPS/TVH, les PME ont indiqué que les principaux défis rencontrés pendant la période d’exemption fiscale étaient la surcharge administrative et les opérations au point de vente (figure 3).
Figure 3 : Les principaux défis rencontrés par les PME lors de la mise en œuvre du congé de TPS/TVH
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Question : Quels sont les principaux défis auxquels vous faites face en raison du congé de TPS/TVH? (Sélectionner toutes les réponses pertinentes)
Source : FCEI, Sondage Votre Voix - Janvier 2025, Du 9 au 31 Janvier 2025, résultats finaux, n= 882.
Note : Les parts présentées dans la figure ont été recalculées afin de refléter uniquement les répondants ayant indiqué avoir fait face à des défis. Au total, 36% des membres ont déclaré n’avoir rencontré aucun défi, tandis que 8% ont répondu « ne sait pas / incertain ».
Malgré l’attention médiatique et publique autour du congé, de nombreuses petites entreprises ont indiqué que l’impact économique réel était limité. La plupart ont estimé que l’exemption avait déplacé les ventes plutôt que créé une nouvelle demande, déplaçant les achats d’une période à une autre sans augmenter les revenus globaux. Le congé de TPS/TVH n’a finalement pas répondu aux attentes, avec un impact économique limité pour la majorité des petites entreprises. Seulement 5 % ont déclaré des ventes plus élevées par rapport à la même période l’année précédente, tandis que 66 % ont indiqué que leurs ventes étaient restées inchangées par rapport à 2023.
Pour les entreprises dont les produits étaient admissibles, les secteurs de l’hôtellerie, des arts, des loisirs et de l’information étaient légèrement plus positifs quant à son impact. Cependant, dans l’ensemble, 82 % des PME tenues d’appliquer l’exemption l’ont jugée infructueuse. Comme l’a résumé un propriétaire :
« Cela ne semble pas avoir d’impact positif sur notre entreprise; c’est juste devenu un cauchemar administratif. »
Figure 4 : Perspectives sur le succès du congé de TPS/TVH selon le secteur
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Question : Comment évalueriez-vous l’efficacité globale du congé de TPS/TVH pour votre entreprise? (Sélectionner une seule réponse)
Source : FCEI, Sondage Votre Voix - Janvier 2025, Du 9 au 31 Janvier 2025, résultats finaux, n= 2 014.
* Petit échantillon. À noter que tous les secteurs n’auraient pas directement bénéficié du congé de TPS/TVH ni été tenus de l’appliquer.
Conclusion
En fin de compte, bien que le gouvernement ait présenté l’exemption comme un moyen de mettre plus d’argent dans les poches des Canadiens, de nombreux propriétaires de petites entreprises l’ont perçue comme une mesure électoraliste entraînant des coûts supplémentaires, des règles confuses et des casse-tête opérationnels, sans offrir le coup de pouce économique promis. Un propriétaire l’a même qualifiée de « dernière tentative d’un gouvernement pour gagner des votes », tandis qu’un autre l’a rejetée comme « une simple manœuvre ». Le gouvernement doit tirer des leçons et éviter de prendre de telles décisions improductives à l’avenir.
Le congé de TPS/TVH met en évidence une leçon claire : les politiques et programmes gouvernementaux visant à soutenir les petites entreprises doivent être réalistes, clairement communiqués et conçus en tenant compte des réalités pratiques des opérations quotidiennes des PME.
Leçons tirées d’un congé de TPS/TVH de deux mois
- Évitez les mesures complexes et contraignantes. Simplifiez les règles pour que les entreprises puissent les appliquer sans casse-tête administratif.
- Donnez un préavis suffisant et des directives claires. Les PME ont besoin de temps et d’information pour bien se préparer.
- Reconnaissez le coût réel pour les PME. Offrez, par exemple, un crédit dans les comptes de TPS/TVH afin de compenser les frais de mise en œuvre.
- Annulez les taxes dues, pénalités et intérêts pour les erreurs commises de bonne foi. Privilégiez l’éducation plutôt que la sanction.
- Évitez les mesures temporaires et éphémères. Si vous réduisez des taxes, faites-le de façon permanente pour offrir une certitude et une stabilité aux entreprises.
Christina Santini, Alchad Alegbah et Olwyn Parkinson, « Défis à la caisse : Leçons tirées du congé de TPS/TVH de 2024 au Canada », FCEI, Blogue Perspective PME, 19 décembre 2025, https://www.cfib-fcei.ca/fr/rapports-de-recherche/défis-à-la-caisse-leçons-tirées-du-congé-de-tps/tvh-de-2024-au-canada.
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